Ton petit tabouret sous les pieds pour déféquer… hé hé !

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explication en rouge plus loin)

Ce n’est pas moi sur la photo. Personnellement, j’ai un simple mini-tabouret rouge.

Nous autres humains sommes cerveau-centrés.

Nous philosophons sur le sens de la vie, nous venons à bout d’équations à plusieurs inconnues, nous retenons un nombre incommensurable de vocabulaire, de langues étrangères, de mots de passe, tout cela grâce à notre cerveau.

Un seul autre organe a un fonctionnement aussi complexe que notre matière grise, l’intestin. Oui, celui qui nous fait faire des bruits pas catholiques, celui qui nous oblige à aller aux toilettes plusieurs fois par jour. On imagine, à tort, qu’il s’agit d’un banal tuyau péteur.

« Ce que nous sommes, c’est aussi ce que nous avons dans le ventre », affirme avec force et talent Giulia Enders, thésarde allemande en gastroentérologie et auteur d’un best-seller outre-Rhin, « Le charme discret de l’intestin », disponible en français chez Actes Sud.

Si tu es sujet au stress tu souffres certainement de crampes d’estomac, de crises de diarrhée ou de constipation. Pourquoi? Parce que lorsque ton cerveau perçoit une situation compliquée, un obstacle difficile à franchir, il comprend qu’il va devoir mobiliser tous ses moyens pour le faire. Il doit te préparer à fuir devant le prédateur.

Il va donc demander à son confrère l’intestin de lui prêter un peu d’énergie. L’intestin, plutôt coopératif, met alors en pause sa digestion, une activité très gourmande en énergie et laisse la priorité au cerveau. L’intestin est alors moins bien irrigué et laisse se développer certaines bactéries qu’il contrôle d’ordinaire.

Bref, cela a des conséquences directes sur notre propension ou non à avoir envie d’aller aux toilettes dans la minute. Ainsi, si ces crises de stress se font à répétition, la première victime sera notre intestin et non notre cerveau, fatigué de devoir toujours se priver d’énergie. Et c’est à ce moment-là que les problèmes digestifs, entre autres, apparaissent.

giulia enders

Un mal de ventre et c’est la déprime assurée

Giulia Enders, 24 ans, est passionnée de gastro-entérologie depuis le jour où elle a découvert que changer son alimentation l’avait guérie d’une grave maladie de peau.

Un jour à 17 ans, son corps s’est couvert de plaies. Un mystère pour les médecins qui suivaient l’adolescente. Si la cortisone aidait un peu, dès que le traitement s’arrêtait, la maladie repartait de plus belle. Après quelques recherches sur Internet, elle décide de s’alimenter plus sainement et son état s’améliore. « Pour moi, cela a été une vraie victoire, et l’occasion de comprendre au plus profond de ma chair que le savoir pouvait être une arme. J’ai alors commencé des études de médecine », raconte-t-elle dans la préface de son livre.

 

À première vue, il ne s’agit pas de la spécialité la plus « sexy » qu’offrent les études de médecine. Pourtant, après la lecture des quelque 300 pages de son livre, on se dit qu’il n’y a rien de plus passionnant que de regarder ses selles après être allé aux toilettes et que le bien-être de son intestin est peut-être l’une des clés de notre félicité. Le sais-tu ? 95% de notre sérotonine est produite par l’intestin. « Toute personne qui souffre de troubles anxieux ou dépressifs devrait garder à l’esprit qu’un ventre mal en point peut aussi être à l’origine d’humeurs noires. L’intestin a d’ailleurs parfois de bonnes raisons, par exemple quand il réagit à trop de stress ou à une allergie alimentaire non détectée. Nous ne devrions pas toujours chercher la cause de nos maux dans notre tête ou dans ce qu’il se passe dans notre vie, car nous sommes plus que cela… », professe-t-elle.

Pour l’amour des bactéries intestinales

bactéries intestinales
Les bactéries intestinales dessinées par Jill Enders, la sœur de Giulia qui signe tous les dessins de l’ouvrage.

Mais, ce livre va bien plus loin qu’un long traité sur les maux d’estomac. Cette doctorante parle avec beaucoup d’humour (et d’amour) de cet organe mystérieux.

« Je pense donc je suis » de Descartes devrait être revu à la lumière de l’avancée des recherches sur notre intestin. Ce dernier est le centre de nos émotions, « Je ressens, de sorte que je pense donc je suis », propose-t-elle comme nouvelle maxime. Et pour ressentir, Giulia Enders se lance même dans un plaidoyer pour le respect de nos indispensables partenaires, les bactéries intestinales. Nous ne les connaissons pas mais elles peuplent tout notre système digestif et nous veulent du bien.

« Vues au microscope, les bactéries intestinales sont de petits points lumineux sur fond de ténèbres, écrit-elle. Mais toutes ensemble, elles sont plus que cela : c’est une véritable communauté que chacun d’entre nous héberge. La plupart de ses membres sont tranquillement installés dans les muqueuses et donnent des cours au système immunitaire, prennent soin de nos villosités intestinales, mangent ce dont nous n’avons pas besoin ou fabriquent des vitamines. D’autres sont logés à proximité des cellules intestinales, les piquent de temps en temps ou fabriquent des toxines ». Évidemment, il existe aussi des terribles E.coli et consors pour qui le but ultime est de nous faire rendre aussi rapidement que possible le contenu de notre estomac, mais retenons que 90% des bactéries sont nos amies. »

 

Et l’art de faire caca, dans tout ça?

Un coup de microscope et le monde des bactéries intestinales est mis à jour. Voilà la grande leçon de ce livre, il faut aller outre la première impression. Ainsi, notre système de défécation est tout sauf dégoûtant. Il parvient même à faire que « nos déchets soient éliminés de la manière la plus discrète et la plus hygiénique qui soit.

« L’homme est quasiment le seul animal à faire ses besoins aussi convenablement », annonce ainsi Giulia Enders. Notre corps a mis en place plusieurs astuces pour ce faire. Et d’abord deux sphincters, des muscles de fermeture. Le premier à l’extérieur obéit au cerveau qui lui dit si le moment est bien choisi ou non pour s’ouvrir. Le second, interne, s’intéresse plutôt à ce qu’il se passe dans l’intestin et à nous débarrasser d' »un pet qui coince ».

giulia enders
Les deux sphincters dessinées par Jill Enders, la sœur de Giulia

Ce contrôle aux frontières se passe de la sorte : quand les restes de digestion arrivent au premier sphincter, un petit échantillon passe à travers. Entre le premier et le deuxième muscle de fermeture, l’échantillon est étudié et les informations récoltées sur son apparence et sa composition sont envoyées au cerveau. Il décide alors soit de contracter un peu plus le sphincter externe soit que le moment est opportun pour aller aux toilettes ou pour lâcher un petit vent.

En ce qui concerne la grosse commission, c’est l’une des grandes découvertes de la lecture de ce livre, nous nous y prenons très mal.

En position assise, notre sphincter reste fermé, la faute à un angle recto-anal qui permet à nos sphincters ne pas avoir à trop travailler lorsque nous sommes debout ou assis. En revanche, en position accroupie, cela se passe beaucoup mieux.

Giulia Enders propose donc d’aller aux toilettes avec un petit tabouret à mettre sous ses pieds et de pencher légèrement le buste en avant. C’est plus confortable et en moyenne, tu passeras cinquante secondes de moins sur le trône!

 

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